Aïn Dara (عين دارا) - Syrie
Auteur : Dr Aly Abbara

Aïn Dara :
Kinalua (à l'âge de fer) - kunulua (à l'époque hittite) - Gindaros (à l'époque grecque).
Dans la vallée de " 'Afrine " (وادي عفرين), un affluent de l'Oronte (العاصي), à 70 km, au Nord-Ouest d'Alep (حلب) et à 10 km de " 'Afrine " (عفرين).
'Aïn (ou 'Ayn - عَيْن) en Arabe = une petite source d'eau ; donc 'Aïn Dara = la source d'eau de Dara.

Le site fut occupé depuis l'âge de fer (fin du IIe millénaire av. J.-C.), jusqu'au XVIe siècle ap.J.-C. ce qui a permis aux archéologues d'identifier des vestiges datant de l'âge de fer, de l'époque néo hittite et de l'époque grecque hellénistique, ensuite, une interruption durant la période romaine, puis de nouveaux vestiges datant de la période byzantine et arabe jusqu'au XVIe siècle.

Dans l'antiquité, Aïn Dara permettait le contrôle de l'accès de la Syrie intérieure à la plaine d'Antioche, au Nord-Ouest d'Alep
L'intérêt archéologique principal d'Aïn Dara est en rapport avec ses vestiges archéologiques datant de l'époque néo-hittite du XIe au IXe siècle av. J.-C. À cette période, Aïn Dara était la capitale d'une principauté nommée de Kunulua dans les textes assyriens ; elle était contemporaine de la principauté araméenne de Gouzana à Tell Halaf (l'actuel Ras al-Aïn). En effet, après la chute de l'Empire hittite, vaincu par les " Peuples de la Mer ", des populations hittites survivent et se ressemblent pour former des petites principautés et royaumes indépendants en Anatolie et dans la Syrie du Nord, comme la principauté de Kunulua (Aïn Dara aujourd'hui) qui est le seul site archéologique syrien possédant des vestiges de cette époque néo-hittite.

Le site d'Aïn Dara est constitué d'une acropole culminant à 30 mètres et dominant une ville basse de 59 hectares de superficie entourée d'un rempart en terre. Le chemin qui mène au sommet de l'acropole fait le tour de cette dernière tout en passant entre des fortifications de l'époque arabe médiévale. Sur le site furent identifiés six niveaux archéologiques, le plus ancien, remonte à l'âge de fer syrien.

Le temple d'Aïn Dara (temple d'Ishtar) Le temple d'Isthar à Aïn Dara, Le temple d'Isthar à Aïn Dara :
Le vestige le plus important de la période néo-hittite est représenté par le temple qui fut édifié sur l'extrémité de l'acropole de la ville. Il s'agit d'un temple inachevé, car il était encore en construction lorsque la région fut envahie par l'armée assyrienne de Salmanazar III (fils d'Assur-Nasirpal II), au milieu du IXe siècle av. J.-C.

Ce temple fut bâti sur un terre-plein basaltique, il est de forme rectangulaire long de 32,5 mètres. Malgré la présence d'ornements de style hittite, le plan du temple est typiquement syrien (une forme rectangulaire, une entrée, une antichambre ou un vestibule puis une cella caractérisée par la présence au fond de celle-ci, d'un sanctuaire dédié à la divinité du temple).

D'après les historiens, le plan du temple d'Ishtar est presque identique à celui du temple du roi Salomon à Jérusalem qui mesurait, d'après les textes bibliques, 60 coudées de longueur (soit 31,4 mètres), 20 coudées de largeur (soit 10,5 mètres) et 30 coudées de hauteur (soit 15,7 mètres) ; il était composé d'une façade avec une entrée principale permettant d'accéder à l'antichambre (le vestibule), puis, dans le même axe, de l'antichambre, on pouvait accéder à la cella ; dans la partie la plus profonde de cette dernière, on accédait à un podium en montant quelques marches ; au fond du podium se trouvait le lieu le plus sacrée du temple, c'est-à-dire le sanctuaire où furent déposées les tables de la loi du prophète Moïse, protégées par deux sculptures d'animaux mythiques.
D'après les historiens, Jérusalem subit une attaque militaire sanglante par l'armée du Pharaon d’Égypte, Shishak (ou Chechonq Ie, 945 - 924 av. J.-C ; fondateur de la 22e dynastie) au cours de la 5e année du règne de Rehoboam, or le roi Rehoboam fut le fils et le successeur du Roi Salomon.

Apparemment, et d'après un bas-relief relatant cette campagne militaire du Pharaon Shishak sur un des murs du temple de Karnak, à Luxor, cette expédition militaire eut lieu vers l'an 925 av. J.-C., donc le roi Salomon mourut vers l'an 930 av. J.-C. et le règne du roi David et son fils, le Roi Salomon, eurent lieu, entre 1000 et 930 av. J.-C. c'est-à-dire à la même époque que l'épanouissement de la ville de kunulua (Aïn Dara aujourd'hui).

Aucun vestige visible du temple du roi Salomon à Jérusalem n'a pu être identifié jusqu'aux nos jours ; donc les historiens voient aujourd'hui, dans le temple d'Ishtar, à Aïn Dara, l'exemple concret de ce temple disparu.

Mais en effet, les plans du temple d'Aïn Dara, et du temple du roi Salomon sont inspirés du plan de la majorité des temples de la Syrie, et que l'on peut facilement identifier en étudiant le temple D, de la déesse Ishtar, sur l'Acropole d'Ebla, puis le Temple P, dans l'aire sacré d'Isthtar à Ebla ; les deux temples furent édifiés vers 1900 av. J.-C. ; donc presque mille ans avant le temple d'Aïn Dara et le temple du roi Salomon.

Le temple d'Ishtar, à Aïn Dara est entouré d'une terrasse permettant de faire le tour extérieur de l'édifice et d'accéder à une entrée secondaire à l'arrière du temple. Devant l'entrée principale Sud du temple, il existait un bassin de pierre servant à des libations culturelles, puis les marches de cette même entrée sont flanquées de deux lions sculptés en signe de la protection divine par Ishtar.

Les parois extérieures, la façade et le vestibule sont composés d'orthostates (de blocs de pierres, en basalte, dressés) ornés par des frises en bas-reliefs aux lions, sphinx et sphinges (sphinx femelles).

Les deux dalles permettant d'accéder à l'antichambre du temple sont caractérisées par la présence de trois énormes empreintes de pieds taillés dans la roche, chacun mesure environ un mètre de grand axe ; d'abord deux pieds joints, puis un pied gauche ; ils sont destinés à indiquer que la divinité du temple, Ishtar, a honoré le temple par son passage, ce qui permettait d'accentuer la valeur religieuse et sacrée du lieu. L'entrée de la cella est précédée par une marche composée d'une dalle possédant elle aussi, deux énormes empreintes de pieds.

La cella proprement dite est dallée, et possédant sur la gauche un podium encadré, au fond, par six orthostates presque semblables et décorés par des bas-reliefs présentant systématiquement : au centre un dieu-montagne à corps couvert de larges écailles, puis à sa droite et à sa gauche, deux génies-taureaux, ou deux génies à tête d'aigle, ou encore à tête de lion. Tous ces génies sont dans l'attitude d'atlante, soutenant et assurant la stabilité d'une corniche représentant les fondements du monde.

Dans le mur arrière du temple qui est épais, fut aménagé un escalier permettant de monter à une terrasse.

En effet, les études archéologiques d'Abou Assaf prouvent que ce temple était dédié à la déesse syrienne et sémite de la fertilité et de l'amour, Ishtar qui avait comme symbole emblématique le lion ; elle est l'amante du dieu-Montagne, avec lequel elle protège cette zone montagneuse de la Syrie. Certains auteurs prétendent que sous les Hittites, ce temple était probablement dédié à Sausga, la grande déesse du panthéon hittite, mais cela fut infirmé suite à la découverte, dans le temple, d'une stèle représentant la déesse syrienne Ishtar (actuellement exposée au Musée archéologique d'Alep).


Références :
Syrie : Guides bleus. Hachette Livre (2007).
Michel Fortin. Syrie terre de civilisations. Musée de la civilisation, Québec - Canada. 1999.
Ross Burns. Monuments de Syrie, guide historique. Edition Dummar. 1998.
Simone Lafleuriel-Zakri. Syrie, Berceau des civilisations. ACR Edition - 1997.
Au pays de Baal et Astarté, 10 000 ans d'art en Syrie. Musée du Petit Palais - Livre d'exposition (26 octobre 1983 - 8 janvier 1984)


Images de la Syrie
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Paris / France