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L'empereur Valérien emprisonné par les Perses Sassanides, Odénath agit :
« Cependant, alors que Valérien traînait sa vieillesse parmi les Perses', Odénath de Palmyre, avec l'armée qu'il avait réunie, réussit presque à ramener l'État romain à sa situation antérieure. II s'empara des trésors du roi ; il s'empara aussi de ce que les rois parthes considéraient comme plus cher encore que leurs trésors, ses concubines. Et c'est pourquoi Sapor, qu'épouvantaient les généraux romains, redoutant spécialement Ballista et Odénath, se replia rapidement dans son propre royaume, ce qui mit fin pour un temps à la guerre persique ».
-
Odénath au temps de l'empereur Gallien :
D'après
(Histoire Auguste - texte du commentaire)
« Après la capture de Valérien - où commencer en effet la biographie de Gallien sinon à partir de ce drame qui pesa fâcheusement
sur sa vie ? - l'Etat connut une grave crise : Odénath s'était déjà emparé du pouvoir en Orient, tandis que Gallien se réjouissait en apprenant la captivité de son père ; les armées erraient à l'aventure, les généraux --- maugréaient, chacun s'attristait de savoir --- un empereur --- romain ignominieusement retenu prisonnier en Perse --- et plus encore de voir que Gallien avait conduit l'Etat à sa perte ».
L'Empire sortait de cette crise profondément bouleversé. Le panégyriste latin de 297 décrit la situation de la manière suivante :
« Alors,
soit par l'imprévoyance du gouvernement, soit par un fléchissement de nos destins, l'Empire était mutilé dans presque tous ses membres ; alors le Parthe (entendons : le Perse) redressait une tête orgueilleuse et le prince de Palmyre se croyait notre égal ; l'Égypte tout entière, les provinces de Syrie avaient fait défection ; la Rhétie était perdue, le Norique et les deux Pannonies dévastés ; l'Italie elle-même, cette
reine des nations, pleurait les ruines sans nombre de ses propres cités,
et l'on ressentait moins douloureusement la perte d'une province lorsqu'on était privé de presque toutes' ».
« Les années 262-267 virent se consolider les zones qu'occupaient
Postumus et Odénath. La première guerre menée par Gallien contre Postumus avait eu lieu en 260-261 : lors d'un siège, l'empereur avait été blessé. La seconde intervint en 263 ou 264 : il avait à ses côtés ses meilleurs généraux, Auréolus et Claude, et interrompit l'entreprise à la nouvelle d'une révolte de la ville de Byzance, en Thrace, qu'il alla lui-même châtier. Odénath, pour sa part, après avoir repoussé les Perses dans la première période, mena sa grande campagne
victorieuse de Mésopotamie entre 263 et 266...»
Pour conserver son autorité sur l'Italie, l'Illyricum et l'Afrique, Gallien se résolut à jeter du lest, au moins provisoirement dans son esprit. Incapable de reconquérir la Gaule, il l'abandonna à Postumus
tout en évitant de le reconnaître et engagea même vainement deux fois son armée contre lui. Du côté de l'Orient, il préféra s'entendre avec le prince de Palmyre Odénath, qui avait brillamment réussi non seulement à chasser les Perses, mais encore à les poursuivre en Mésopotamie. Odénath vainquit Quiétus et le fit mettre à mort ; il demeurait vassal théorique de Rome et était à la tête des troupes d'Orient : Gallien lui conféra le titre de commandant (dux), puis celui de général en chef (imperator).
Ce fut en 264 ou 265, Gallien prenant alors à son compte les succès d'Odénath en Mésopotamie.
D'après
(Histoire Auguste - texte original)
Tandis que ces convulsions agitaient l'Etat dans l'univers entier, Odénaths, mis au courant de l'assassinat de Macrien et son fils, de l'usurpation d'Auréolus et de la mollesse du gouvernement de Gallien, se hâta de marcher contre l'autre fils de Macrien pour le capturer en même temps que son armée si la Fortune le lui permettait. Mais les compagnons du fils de Macrien - il se nommait Quiétus - embrassèrent le parti d'Odénath à l'instigation de Ballista, le préfet de Macrien, et assassinèrent le jeune homme dont ils jetèrent le cadavre par-dessus le mur, puis ils se rendirent tous à Odénath. C'est ainsi qu'Odénath devint l'empereur de presque tout l'Orient, tandis qu'Auréolus tenait l'IIlyricum et Gallien Rome.
Sous le consulat de Gallien et de Saturninus [en 264], Odénath,
roi de Palmyre, exerça le pouvoir sur tout l'Orient, surtout grâce à ses valeureux exploits attestant qu'il était digne de porter les insignes d'une si haute majesté, en un moment où Gallien restait inactif ou bien se
livrait à la débauche ou à des enfantillages et des bouffonneries. Odénath commença donc par déclarer la guerre aux Perses pour venger Valérien dont le fils n'était guère enclin à le faire. Il occupa immédiatement Nisibis et Carrhes, et les habitants se livrèrent à lui en lançant des invectives contre Gallien. Cela n'empêcha cependant pas Odénath de manifester du respect envers Gallien : il lui envoya par exemple les satrapes qu'il avait capturés, comme s'il voulait lui permettre de les insulter et de se donner de l'importance. Quand ils eurent été amenés à Rome, Gallien célébra son (propre) triomphe pour une victoire qu'avait remportée Odénath sans faire aucune mention de son père, qu'il ne se résigna à diviniser que contraint et forcé à l'annonce de sa mort - alors qu'en réalité il vivait encore, car son décès qu'avait appris Gallien était une fausse nouvelle.
Odonath, pour sa part, assiégea à Ctésiphon une multitude de Parthes et, après avoir dévasté toute la région alentour, extermina un très grand nombre d'hommes.
Mais, comme les satrapes y étaient accourus de partout pour la
défense commune, il y eut des combats longs et indécis, aussi la victoire romaine fut-elle d'autant plus longue à venir. Car Odénath, dont l'unique but était de libérer Valérien, pressait l'ennemi jour après jour, mais cet excellent général était aux prises avec les difficultés inhérentes au terrain en pays étranger.
Pendant que ces événements se déroulaient en Perse, les Scythes envahirent la Cappadoce où ils occupèrent plusieurs cités puis,
après une guerre longue et indécise, se lancèrent contre la Bithynie.
On rapporte, avec des éloges mérités, une excellente initiative qu'il prit : pendant le consulat de son frère Valérien et de son parent Lucillus [en 265], il apprit qu'Odénath avait anéanti les Perses et soumis Nisibis et Carrhes à la domination romaine, que toute la Mésopotamie était en notre pouvoir, qu'on avait fini par atteindre Ctésiphon, que le roi avait été mis en fuite, les satrapes capturés et une multitude de Perses tués ; il associa alors Odénath à l'empire en lui conférant le titre d'Auguste et fit frapper à son nom une monnaie sur laquelle il emmenait en captivité des prisonniers perses. Cet acte fut accueilli favorablement par le Sénat, la Ville et les gens de tout âge.
Pendant qu'Odénath était occupé à guerroyer contre les Perses et
que Gallien, à son habitude, se livrait à des passe-temps futiles, les Scythes, qui avaient équipé une flotte, parvinrent à Héraclée d'où ils retournèrent chez eux chargés de butin ; beaucoup cependant, vaincus en combat naval, périrent dans le naufrage de leur bateau.
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L'assassinat d'Odénath et la prise du pouvoir par Zénobie :
D'après
(Histoire Auguste - texte du commentaire)
Entre-temps, Odénath avait été assassiné en 266 ou 267 ; il était remplacé désormais par son fils Vaballath et son épouse Zénobie, qui demeuraient les alliés théoriques de l'empereur romain.
D'après
(Histoire Auguste - texte original)
C'est vers le même moment qu'Odénath, victime d'un complot tramé par son cousin, fut assassiné ainsi que son fils Hérode auquel il avait conféré le titre d'empereur. Comme les fils qui lui restaient, Hérennianus et Timolaus, étaient de tout jeunes enfants, son épouse Zénobie s'arrogea alors, [elle-même] le pouvoir et l'exerça pendant une longue période, non pas avec la mollesse qui caractérise le comportement féminin, mais en surpassant en courage et en habileté non seulement Gallien - n'importe quelle gamine aurait pu gouverner mieux que lui - mais même bon nombre d'empereurs. Quant à Gallien, à la nouvelle de l'exécution d'Odénath, il se prépara à faire la guerre aux Perses pour venger un peu tardivement son père ; il réunit une armée grâce au général Héraclianus et se conduisit en prince habile. Mais quand cet Héraclianus se fut lancé contre les Perses, il fut vaincu par les Palmyréniens et perdit toutes les troupes qu'il avait rassemblées, tandis que Zénobie exerçait son autorité virile sur les Palmyréniens et la plus grande partie des peuples d'Orient.
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Zénobie sous le consulat de l'Empereur Claude :
D'après
(Histoire Auguste - texte du commentaire)
Nous sommes ensuite beaucoup mieux renseignés, à la fois par
l'H.A. et par Zosime, dérivant l'un et l'autre de Dexippe, sur les événements qui se déroulèrent en Orient, mais, à nouveau, il s'agit
d'un témoignage déformé, qui gonfle à l'excès le rôle de Claude et
attribue à son règne des faits qui relèvent cette fois de l'époque
d'Aurélien. Si l'on suit A. Alfôldi, Zénobie et Vaballath continuèrent pendant ces deux années à conserver leurs liens avec Rome. Les monnaies émises en Orient dans les ateliers de Cyzique, Antioche et
Alexandrie restaient frappées au nom de Claude comme à ceux de
Zénobie et de Vaballath jusqu'à l'avènement d'Aurélien. En Asie
Mineure, la domination de Palmyre s'étendait, dans l'intérieur, jusqu'à Ancyre (Ankara) seulement. L'empereur sut donc se montrer patient
et prudent et conserva l'attitude de Gallien aussi bien en Orient qu'en
Occident.
D'après
(Histoire Auguste - texte original)
Claude avait été élu empereur, comme on ne pouvait organiser une
séance du Sénat pour célébrer les rites sacrés, les sénateurs revêtirent
leur toge et se rendirent au temple d'Apollon. Là, après lecture du
message de l'empereur Claude, s'élevèrent en son honneur ces acclamations : « Claude Auguste, que les dieux te préservent !»- répété soixante fois. « Claude Auguste, c'est toi ou quelqu'un semblable à toi
que nous avons toujours désiré comme prince ! » - répété quarante
fois. « Claude Auguste, c'est toi dont l'État avait besoin !»- répété quarante fois. « Claude Auguste, tu es pour nous un frère, tu es un
père, tu es un ami, tu es un bon sénateur, tu es un vrai prince ! »
répété quatre-vingts fois. « Claude Auguste, délivre-nous d'Auréolus !» répété cinq fois. « Claude Auguste, délivre-nous des Palmyréniens !» répété cinq fois. « Claude Auguste, délivre-nous de Zénobie
et de Vitruvia !» répété sept fois. « Claude Auguste, Tétricus n'a rien fait [de mal] !» répété sept fois.
« Pères conscrits, c'est avec stupéfaction que vous allez apprendre ce qui n'est que la vérité. Trois cent vingt mille Barbares ont pénétré en armes sur le territoire romain : si je parviens à les vaincre, rendez justice à mes mérites ; si je n'y parviens pas, songez
que c'est après le règne de Gallien que je m'efforce de combattre.
L'État est complètement épuisé. Nous avons à combattre lourds de
l'héritage de Valérien, d'Ingénuus, de Régilianus, de Lollianus, de Postumus, de Celsus, de mille autres qui, par mépris envers l'empereur
Gallien, se sont rebellés contre l'Étal. Il ne reste plus aujourd'hui
ni boucliers, ni épées, ni javelots. Les Gaules et les Espagnes, sources
de la puissance de l'État, se trouvent aux mains de Tétricus, et tous les
archers -j'ai honte de le dire - sont sous le contrôle de Zénobie. Tout
ce que nous réussirons à accomplir sera presque un exploit. »
J'ai rapporté ces témoignages afin qu'il soit évident pour tous que Constance, notre très vénéré César, est un homme de race divine, qu'il descend d'une famille d'Augustes, sans préjudice pour les Augustes Dioclétien et Maximien ni pour son frère Galère. Cependant, tandis que le divin Claude était occupé à ces activités, les Palmyréniens, conduits par Saba et Timagène, entreprirent
une guerre contre les Égyptiens qui, grâce à leur opiniâtreté et à leur infatigable résistance au combat typiquement égyptiennes, réussirent à les vaincre. Néanmoins, le commandant des Égyptiens, Probatus, fut tué dans une embuscade tendue par Timagène. Mais tous les Égyptiens firent leur soumission à l'empereur romain et, en dépit de l'absence de Claude, lui jurèrent fidélité.
Cela est faux. La conquête de l'Égypte par les Palmyréniens est postérieure à la mort de Claude ; il est vrai que Zosime, 1, 44, commet la même erreur.
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Zénobie sous le consulat de l'Empereur Aurélien :
D'après
(Histoire Auguste - texte du commentaire)
C'est à l'Orient qu'Aurélien s'attacha d'abord. Sans rompre officiellement avec lui, Zénobie profita de la mort de Claude pour pousser ses avantages en agrandissant son domaine territorial. Les troupes palmyréniennes, dirigées par le général Zabdas, s'emparèrent de l'Égypte entière entre le mois de septembre et le 2 novembre 270 : le nom de Vaballath y apparaît sur les papyrus et les monnaies, à côté de celui d'Aurélien, à partir de cette dernière date. En Asie Mineure, si Ancyre relevait déjà de Zénobie avant la mort de Claude, celle-ci visait à contrôler le reste du pays jusqu'en Bithynie. Or, un peu avant le 19 août 271, elle prit le titre d'Augusta et son fils celui d'Auguste sur des monnaies frappées à Antioche et à Alexandrie, en omettant le nom d'Aurélien : cette initiative manifestait la rupture, même si les papyrus égyptiens continuaient de citer Aurélien et de nommer Vaballath simplement roi comme dans la période précédente. Ce n'est qu'en 272 que les troupes menées par Aurélien entrèrent en campagne, reprirent d'abord Ancyre et Tyane, vainquirent leurs adversaires à Daphné près d'Antioche, puis à Émèse, et assiégèrent Palmyre. Zénobie s'enfuit vers l'Euphrate, fleuve près duquel elle fut rattrapée et capturée, puis dirigée en prisonnière vers Rome avec son
fils. En même temps l'Égypte était reconquise : c'est entre le 17 avril et le 28 août 272 que le nom de Vaballath disparut sur les papyrus et qu'Aurélien y fut nommé seul.
D'après
(Histoire Auguste - texte original)
Après l'occupation de Tyane, un rapide combat près de
Daphné permit à Aurélien de s'emparer d'Antioche où il accorda l'impunité générale ; et c'est à partir de ce moment, on peut l'affirmer,
qu'il se conforma aux préceptes du vénérable Apollonius et fit preuve
de plus d'humanité et de clémence. Puis un engagement décisif
contre Zénobie et son allié Zab[d]as se déroula en une grande bataille
près d'Émèse. Au moment où la cavalerie d'Aurélien, à bout de
forces, était prête à se disloquer et à prendre la fuite, soudain, par une
intervention surnaturelle - cela fut révélé par la suite -, une apparition divine prodigua ses encouragements aux fantassins et même les cavaliers se ressaisirent. Zénobie fut mise en déroute ainsi que Zab[djas et
l'on remporta une victoire complète. Avant ainsi redonné à l'Orient
sa stabilité, Aurélien entra en vainqueur à Émèse et se rendit aussitôt
au temple d'Héliogabale afin d'y accomplir ses veux pour ainsi dire
au nom de la communauté. Or il y retrouva la même apparition
surnaturelle qu'il avait vue lui portant secours pendant la bataille. Aussi fit-il ériger à cet endroit des temples qu'il dota de trésors d'énorme valeur et éleva-t-il à Rome un temple dédié au Soleil et qu'il
consacra avec des marques d'honneur encore plus grandes. comme nous le dirons le moment venu.
Aurélien se dirigea ensuite vers Palmyre pour prendre la
ville d'assaut et mettre ainsi un terme à ses harassantes entreprises.
Mais, en cours de route, il dut faire face à de nombreux incidents
provoqués par des brigands syriens qui ne cessaient de harceler son
armée, et, pendant le siège. il courut un grave danger puisqu'il fut
même blessé par une flèche.
Nous possédons une lettre qu'il adressa à Mucapor et dans laquelle, sans souci de la réserve inhérente à la dignité impériale, il fait
des confidences sur les difficultés de cette guerre : « Les Romains disent que je fais seulement la guerre contre une femme, comme si
Zénobie était toute seule à se battre contre moi, et avec ses seules
forces personnelles ; or le nombre des ennemis est aussi grand que si
je devais me battre contre un homme, sauf qu'ils sont placés sous le
commandement d'une femme qui, par suite de sa mauvaise conscience
et de la crainte qu'elle éprouve, est un adversaire bien pire. Il est impossible de préciser quelle quantité de flèches, quel appareil militaire, quelle quantité de javelots et de pierres se trouvent ici ; il n'est
pas une fraction de mur qui ne soit occupée par deux ou trois ballistes ; il y a aussi des machines qui lancent des projectiles enflammés. Que
dire de plus ? Elle est peureuse comme une femme mais combat
comme un homme qui redoute le châtiment. J'ai néanmoins la ferme conviction que les dieux, qui n'ont jamais refusé leur assistance à nos
entreprises, accorderont leur aide à l'État romain.».
Finalement, exténué et découragé par ses revers, il envoya à Zénobie une lettre par laquelle il lui demandait de se rendre tout en lui
promettant la vie sauve ; en voici la copie :
« Aurélien, empereur du
monde romain et nouveau conquérant de l'Orient, à Zénobie et à tous
ceux que lie à elle une entente militaire. C'est de votre propre initiative que vous auriez dû faire ce que ma lettre vous impose maintenant.
Je vous ordonne en effet de vous rendre en vous offrant en échange la
vie sauve, à la condition, Zénobie, que tu ailles vivre avec les tiens,
dans le lieu que je t'assignerai, en accord avec le très noble Sénat.
Vous devrez verser au Trésor de Rome pierreries, or, argent, soie,
chevaux, chameaux. Les Palmyréniens conserveront leur statut.»
Au reçu de cette lettre, Zénobie répondit sur un ton plus
arrogant et plus insolent qu'il ne convenait à sa situation, dans l'intention, à mon avis, d'intimider son adversaire. Je donne également ici le
texte de sa lettre :
« Zénobie, reine d'Orient, à Aurélien Auguste.
Jamais personne avant toi n'a demandé par lettre ce que tu réclames.
C'est par la seule valeur que tout doit se régler en matière de guerre.
Tu exiges ma reddition comme si tu ignorais que Cléopâtre a préféré mourir en reine plutôt que de continuer à vivre dans un rang quelconque. Les renforts perses ne nous manquent pas : nous les attendons incessamment ; nous avons de notre côté les Sarrasins et les Arméniens. Des brigands syriens ont eu raison de ton armée, Aurélien. C'est tout dire ! Lorsque arriveront donc ces forces dont j'attends
la venue de toutes parts, tu abandonneras sûrement cette morgue avec
laquelle tu m'intimes l'ordre de me rendre, comme si tu étais vainqueur
sur tous les fronts. »
Nicomaque affirme avoir traduit du syrien en grec cette lettre que
Zénobie avait personnellement dictée. Quant à la lettre précédente, celle d'Aurélien, elle avait été écrite en grec.Quand il reçut cette missive, Aurélien, loin d'éprouver
de la honte, laissa éclater sa fureur et, rassemblant aussitôt son armée et ses généraux, assiégea Palmyre de toutes parts ; avec l'énergie qui
le caractérisait, il ne laissa de côté aucun détail qui pût passer pour un
défaut de mise au point ou de prévoyance. Il intercepta les renforts envoyés par les Perses, corrompit les troupes auxiliaires sarrasines et
arméniennes et les fit passer de son côté en usant à la fois de violence
et de diplomatie.
Après de vifs assauts, il finit par triompher de cette
femme si puissante. Zénobie, vaincue, s'enfuyait donc avec des chameaux (qu'on appelle là-bas dromadaires) et tentait de gagner la
Perse lorsqu'elle fut capturée par des cavaliers envoyés à ses trousses et qui la remirent au pouvoir d'Aurélien. Aussi Aurélien, victorieux
et désormais maître de tout l'Orient - tout en gardant Zénobie prisonnière, prit-il à l'encontre des Perses, des Arméniens et des Sarrasins, avec beaucoup de morgue et d'insolence, les mesures qu'exigeait la
situation.
Cependant, pour en revenir à notre propos, il y eut une
grande effervescence chez les soldats qui réclamaient tous que Zénobie
fût châtiée. Mais Aurélien, jugeant inconvenant de mettre à mort
une femme, fit tuer un grand nombre de ceux qui l'avaient pousséeà déclencher, à organiser et à mener la guerre et réserva la femme à son
triomphe pour qu'elle fût exhibée aux yeux du peuple romain. Parmi ceux que l'on exécuta fut, dit-on, péniblement ressenti le cas du philosophe Longin qui passe pour avoir été le professeur de grec de Zénobie. On prétend d'ailleurs que, si Aurélien le fit mettre à mort, c'est
parce qu'il se murmurait que cette lettre si insolente de Zénobie avait été dictée sur ses conseils, alors qu'en réalité elle avait été rédigée
en syriaque.
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La révolte de 273 ap.J.-C. et la destruction de Palmyre et le massacre de sa population :
D'après
(Histoire Auguste - texte du commentaire)
Elle rapporte également la révolte qui se développa en 273, quand, après avoir pris Palmyre et capturé Zénobie, l'empereur et ses troupes eurent traversé la mer de Marmara (Propontide) pour se diriger vers
l'Occident. Zosime donne le nom de l'usurpateur proclamé à Palmyre,
Antiochus ; il indique qu'Aurélien « prépara une expédition vers
l'Orient de l'endroit où il se trouvait », se présenta inopinément à Antioche, puis prit et détruisit Palmyre, tout en graciant Antiochus « en raison de son origine obscure ». L'H.A. narre ces événements de manière assez convenable, mais déforme la personnalité du chef du soulèvement : elle l'appelle Achilleus et le présente même
comme un parent de Zénobie, ce qui est en contradiction avec Zosime ;
du reste, le nom du « tyran » Antiochus est confirmé par Polémius
Silvius.
D'après
(Histoire Auguste - texte original)
Donc, une fois l'Orient pacifié, il revint en vainqueur en Europe ;
là il écrasa les forces des Carpes et, comme le Sénat lui avait, en son
absence, conféré le titre de Carpique', il lui envoya ce message sous
forme de plaisanterie : « Il ne vous reste plus, pères conscrits, qu'à m'appeler aussi Carpisclique. » Or il est bien connu que le carpisclum est une sorte de chaussure. Ce surnom de Carpique lui paraissait en effet peu reluisant, alors qu'il portait déjà ceux de Gothique, de
Sarmatique, d'Arménique, de Parthique et d'Adiabénique.
Il est rare, je dirais presque impossible, que les Syriens
restent fidèles à leur parole. C'est ainsi que les Palmyréniens, qui
avaient déjà été vaincus et écrasés, profitèrent de l'engagement d'Aurélien en Europe pour déclencher une révolte, et non des moindres. Ils
tuèrent en effet Sandarion qu'Aurélien avait laissé là pour commander
la place, ainsi que six cents archers ; puis ils offrirent le pouvoir à un
certain Achilleus, parent de Zénobie. Mais Aurélien, qui était toujours sur ses gardes, revint du Rhodope et, comme la ville méritait ce
sort, il la détruisit. Finalement, la cruauté d'Aurélien ou, comme disent certains, sa sévérité alla si loin qu'on cite de lui une lettre qui
confesse ostensiblement sa sauvage fureur. En voici la copie : « Aurélien Auguste à Cerronius Bassus'. Il n'est plus nécessaire que les épées
des soldats continuent leur oeuvre. On a déjà mis à mort et exterminé suffisamment de Palmyréniens. Nous n'avons pas épargné les femmes,
nous avons tué les enfants, étranglé les vieillards, massacré les paysans.
A qui laisserons-nous désormais le territoire de la ville ? Il faut faire
grâce aux survivants. Nous croyons en effet que leur si petit nombre
s'est amendé en voyant les supplices infligés à tant d'autres. Quant
au temple du Soleil de Palmyre qu'ont pillé les porte-aigle de la troisième légion, ainsi que les porte-enseigne, le porte-étendard [à dragon], les sonneurs de cor et les sonneurs de trompette, je veux absolument
qu'on le restaure dans son état primitif. Tu as à ta disposition trois cents livres d'or tirées des coffres de Zénobie, mille huit cents livres d'argent provenant de la fortune des Palmyréniens, ainsi que les joyaux
de la reine. Emploie tout cela pour restituer au temple son éclat : tu
te rendras ainsi très agréable tant à moi qu'aux dieux immortels. De mon côté je vais écrire au Sénat en lui demandant d'envoyer un pontife
pour consacrer le temple. » Cette lettre, comme nous le voyons, montre que ce prince inflexible avait assouvi sa cruauté.
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Cérémonie triomphale de l'Empereur Aurélien - Rome 274 ap.J.-C. :
D'après
(Histoire Auguste - texte du commentaire)
Il faut reconnaître qu'Aurélien avait bien mérité l'honneur du
triomphe qui lui fut décerné et qui donna lieu, en 274, à une cérémonie
grandiose dont l'H.A a notablement embelli la
description, mais qui n'en impressionna pas moins l'assistance par le
spectacle de Zénobie et de Tétricus marchant devant le char du
vainqueur.
D'après
(Histoire Auguste - texte original)
Aurélien donc, maître de l'univers après avoir pacifié l'Orient, les Gaules et le reste du monde, se dirigea vers Rome pour célébrer sous les yeux des Romains son triomphe sur Zénobie et Tétricus, c'est- à-dire sur l'Orient et l'Occident, n'est pas hors de propos de savoir comment se déroula le triomphe d'Aurélien : il fut en effet particulièrement somptueux.
I1 y avait trois chars royaux : le premier, celui d'Odénath, était d'un beau travail et rehaussé d'argent, d'or et de pierreries ; le second, que le roi des Perses avait offert à Aurélien, était d'une facture tout aussi ouvragée ; le troisième était celui que Zénobie s'était fait fabriquer avec l'espoir de l'utiliser pour voir la ville de Rome. Cet espoir ne fut d'ailleurs pas déçu puisqu'elle fit bien son entrée dans la ville, mais vaincue et traînée en triomphe. II y avait un autre char, tiré par quatre cerfs , qui passe pour avoir appartenu au roi des Goths. C'est sur ce dernier, comme beaucoup d'auteurs l'ont rapporté, qu'Aurélien monta au Capitole pour y immoler les cerfs qu'il avait, dit-on, voués à Jupiter Très Bon Très Grand lorsqu'il les avait capturés en même temps que le char.
Ouvraient la marche vingt éléphants, des fauves de Libye apprivoisés et deux cents animaux variés de Palestine, dont Aurélien fit aussitôt
présent à des particuliers pour ne pas alourdir le fisc du coût de leur
entretien ; suivaient, rangés par espèces, quatre tigres, des girafes, des élans et autres bêtes du même genre ; huit cents paires de gladiateurs, sans parler des prisonniers originaires des pays barbares : Blemmyes, Axoumites, gens de l'Arabie Heureuse, Indiens, Bactriens, Ibères, Sarrasins et Perses portant chacun leurs présents, Goths, Alains, Roxolans, Sarmates, Francs, Suèves, Vandales, Germains', les mains liées puisqu'ils étaient prisonniers. Dans ce groupe de tête figuraient également les notables de Palmyre qui avaient survécu et des Égyptiens pour les punir de leur rébellion.
On fit défiler également dix femmes qu'Aurélien avait capturées tandis qu'elles combattaient, en vêtement d'homme, au milieu des Goths. Beaucoup d'autres avaient été tuées. Une pancarte les présentait comme descendantes des Amazones : on portait en effet devant les prisonniers des pancartes indiquant le nom de la peuplade à laquelle ils appartenaient. Au milieu du cortège figurait Tétricus, revêtu d'une chlamyde écarlate, d'une tunique jaune et de braies gauloises, et flanqué de son fils qu'il avait proclamé empereur en Gaule. Puis s'avançait Zénobie, parée de joyaux et chargée de chaînes d'or
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