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Fables et contes traduits
de la littérature arabe ancienne
par Fahd TOUMA
Les Mille et Une Nuits. (XIII°-XIV°
Siècle).
1-Lâne et le buf.
- On raconte quune personne possedait un âne
qui vivait dans loisiveté et un buf épuisé
par le labeur. Le buf se plaignit un jour à lâne
et lui dit :
-« Frère, nas-tu pas un conseil qui maidera
à esquiver cette fatigue ? »
-« Fais semblant dêtre malade, lui dit lâne,
ne mange pas ton fourrage ; le lendemain, lorsque notre maître
te verra dans cet état, il te laissera et ne te prendra
pas au labour ; alors tu te reposeras. »
Leur maître, nous confie le conte, comprenant la langue
des animaux, entendit leur conversation.
Le buf suivit le conseil de lâne ; le lendemain
leur maître vint et remarqua que le buf navait
pas mangé son fourrage ; il le laissa, prit lâne
à sa place et laboura avec lui toute la journée.
Celui-ci crut quil allait mourir dépuisement...
Il regretta alors son conseil au buf.
Lorsquil rentra le soir, le buf lui demanda :
-« Comment vas-tu, frère ? »
-« Bien, répondit-il, cependant jai entendu
un propos te concernant, qui ma alarmé. »
-« De quoi sagit-il ? » demanda le buf.
-« Jai entendu notre maître dire, lui répondit
lâne, que si le buf devait rester malade,
il faudrait légorger pour quil ne perde
pas de sa valeur. Je te conseille donc de reprendre tes habitudes
et de manger ton fourrage pour éviter que ce grand
malheur ne tarrive. »
-« Tu as raison, lui répondit le buf. »
Et il se mit tout de suite à sa mangeoire.
Entendant cela, leur maître éclata de rire.
Moralité : Celui qui a peu desprit commet des
actes qui peuvent se retourner contre lui.
2-Les deux voleurs et lâne.
- On raconte que deux larrons volèrent un âne
et lun deux alla le vendre. Il rencontra un homme
portant un plateau plein de poissons. Lhomme lui demanda
:
-« Vends-tu cet âne ? »
-« Oui, répondit le larron. »
-« Tiens ce plateau de poissons, lui dit lhomme,
afin que jenfourche cet âne pour lessayer.
Sil me plaît, je te lachète à
un prix qui te fera plaisir. »
Le larron tint le plateau, lhomme enfourcha lâne
et se mit à le faire courir et à lessayer
par des allées et venues, puis petit à petit,
séloigna du larron et prit quelque ruelle, puis
passa de lune à lautre jusqu'à ce
quil disparût.
Le larron, désemparé, comprit que cétait
une ruse pour lui dérober lâne. Il revint
alors avec le plateau de poissons. Son compagnon lui demanda
:
-« Quas-tu fait de lâne ? Las-tu
vendu ? »
-« Oui, répondit-il. »
-« A quel prix ? questionna son ami. »
-« Au prix dachat, et ce plateau en est le bénéfice.
»
Lautre lui déclara alors :
-« Que de chasseurs, voulant chasser, se trouvent pris
ou reviennent bredouilles. »
3-Les voleurs et lâne.
(Selon Jean De La Fontaine).
-
Pour un âne enlevé, deux voleurs
se battaient :
Lun voulait le garder, lautre le voulait vendre.
Tandis que coups de poings trottaient
Et que nos champions songeaient à se défendre,
Arrive un troisième larron
Qui saisit maître Aliboron.
Lâne, cest quelquefois une pauvre province
:
Les voleurs sont tel et tel prince,
Comme Transylvain, le Turc, et le Hongrois.
Au lieu de deux, jen ai rencontré trois :
Il est assez de cette marchandise.
De nul deux nest souvent la province conquise
:
Un quart voleur survient, qui les accorde net
En se saisissant du baudet.
AL-QALYÛBÎ. (1580-1659,
XVI°-XVII° Siècle) .
1-Le lion, le loup et le renard.
- Exemple de celui qui profite de l'expérience des
autres.
Un lion, un loup et un renard se lièrent damitié,
et sortirent pour chasser. Ils prirent un âne sauvage,
un lièvre et un cerf.
Le lion sadressa au loup :
-« Partage entre nous », ordonna-t-il.
Le loup dit :
-« Le cas me paraît clair : lâne est
à toi, le lièvre est au renard et le cerf est
à moi. »
Le lion lui asséna un grand coup qui lui sépara
la tête du corps ; puis il sadressa au renard
:
-«Ah ! que ton ami est ignorant dans lart du partage.
Alors, partage entre nous ».
Le renard déclara :
-« Cela me paraît évident : lâne
est pour le déjeuner de Sa Majesté, le cerf
est pour son dîner et le lièvre est le goûter,
entre ces deux repas. »
-« Que tu es juste, sécria le lion ; qui
ta inculqué cette justice ? »
Le renard répondit :
-« Cest de voir la tête du loup séparée
de son corps. »
2-La génisse, la chèvre et la brebis
en société avec le lion.
(Selon La Fontaine).
- La génisse, la chèvre, et leur sur
la brebis,
Avec un fier lion, seigneur du voisinage,
Firent société, dit-on, au temps jadis,
Et mirent en commun le gain et le dommage.
Dans les lacs de la chèvre un cerf se trouva pris.
Vers ses associés aussitôt elle lenvoie.
Eux venus, le lion par ses ongles compta,
Et dit : « Nous sommes quatre à partager la proie.
»
Puis, en autant de parts, le cerf il dépeça
;
Prit pour lui la première en qualité de sire.
« Elle doit être à moi, dit-il ; et la
raison,
Cest que je mappelle lion :
A cela lon na rien à dire.
La seconde, par droit, me doit échoir encor :
Ce droit, vous le savez, cest le droit du plus fort.
Comme le plus vaillant, je prétends la troisième.
Si quelquune de vous touche à la quatrième,
Je létranglerai tout dabord. »
3-Lhomme, le lion et lours
au fond du fossé
- On raconte quen fuyant un lion, un homme tomba dans
un fossé ; le lion y tomba à sa suite. Dans
ce fossé il y avait un ours.
Quand le lion le vit, il lui demanda :
-« Depuis combien de temps es-tu dans ce fossé
? »
-« Depuis de nombreux jours, répondit lours,
et je meurs de faim. »
-« Mangeons donc cet homme pour résister, suggéra
le lion. »
-« Et si ensuite la faim revient nous tourmenter, que
ferons-nous ? interrogea judicieusement lours. Il est
préférable que nous fassions serment à
cet homme de ne pas lui faire de mal, il trouvera alors une
ruse pour nous sortir dici, car il est plus malin que
nous dans ce domaine .»
Ils sengagèrent par serment auprès de
lhomme ; alors celui-ci trouva un stratagème
qui les délivra tous les trois.
Lours avait donc raison dagir de façon
réfléchie et de ne pas suivre le conseil du
lion.
4-Lhomme et lours dans larbre.
- On raconte que, pour fuir un lion, un homme se dirigea
vers un arbre, il y grimpa et fut surpris, là-haut,
de voir un ours cueillir des fruits.
Le lion, parvenu à larbre, se coucha à
son pied, attendant que lhomme descende.
Quand lours vit lhomme, il lui fit des signes
avec sa patte sur le museau, comme pour lui signifier :
-« Ne dis rien afin que le lion ne saperçoive
pas de ma présence.»
Perplexe, lhomme ne savait que faire...Ayant sur lui
un petit couteau, il se mit à tailler la branche sur
laquelle était lours. Une fois la branche rognée,
lours tomba ; le lion se précipita sur lui et
ils se mirent à se battre...
Puis le lion eut le dessus, et dévora lours.
Rassasié, il quitta les lieux, et lhomme put
ainsi repartir sain et sauf, avec la permission de Dieu.
Réalisation :
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